Au sud de Burgos, une fosse commune contenant les squelettes de républicains fusillés en 1936 a été mise au jour en mai 2007. La justice veut désormais rouvrir les archives des heures noires de la guerre civile (1936-1939) et du franquisme (1939-1975). Crédits photo : Mario FOURMY/REA
Le juge Garzon se penche sur les disparus du franquisme .
En Espagne, le juge Garzonravive le passé franquisteLa justice a lancé une demande d'information préliminaire sur les victimes de la guerre civile.
Diane Cambon, à Madrid02/09/2008 Mise à jour : 22:26
En lançant une demande d'information préliminaire sur les victimes de la guerre civile et du franquisme, la justice espagnole entrouvre la porte à une enquête sur une période délicate de son histoire.
Plus de trente ans après le retour à la démocratie, la justice espagnole pourrait se pencher sur les crimes de la dictature franquiste. Le juge madrilène Baltasar Garzon, célèbre hors des frontières espagnoles pour avoir lancé un mandat d'arrêt contre le général chilien Augusto Pinochet, a demandé, lundi, à plusieurs institutions espagnoles des renseignements sur les personnes disparues pendant la guerre civile espagnole (1936-1939) et le franquisme (1939-1975). Un préalable à l'ouverture éventuelle d'une enquête judiciaire sur cette délicate période de l'histoire espagnole.
L'Espagne, qui se veut à l'avant-garde d'une justice universelle, avec l'arrestation de Pinochet et le jugement des crimes de la dictature argentine, n'a jamais tenu le moindre procès du franquisme. «L'Espagne a vécu une transition démocratique amnésique», assure Jesus de Andreu, professeur de sciences politiques à l'université à distance Uned.
Au moment de bâtir la démocratie, les dirigeants ont estimé que pour y parvenir il fallait pardonner les fautes du passé, bannir toute chasse aux sorcières et ne pas exiger de responsabilités. L'oubli était aux yeux des Espagnols la condition de la réussite d'une démocratie fragile qu'en 1981 encore, le lieutenant-colonel Tejero tenta de renverser par un putsch avorté de justesse grâce à l'intervention du roi Juan Carlos.
Travail de catharsis
«Aujourd'hui, on peut considérer que l'Espagne, pays européen depuis 1986, jouit d'une solide démocratie, il est donc temps de solder la dette du pays envers les victimes du franquisme», assure Emilio Silva, président de l'Association pour la récupération de la mémoire historique (ARMH). Et d'ajouter : «Contrairement à l'Allemagne nazie, l'Afrique du Sud ou l'Argentine, le pays n'a pas fait son travail de catharsis.» C'est sur son initiative que le magistrat Garzon a accepté de se lancer dans cette collecte titanesque d'informations.
L'an dernier, l'ARMH a déposé une dizaine de plaintes à Madrid, pour des demandes d'enquêtes concernant la disparition de quelque 30 000 Espagnols. La guerre civile a fait plus de 500 000 morts. La dictature franquiste qui a suivi fit fusiller sommairement entre 1939 et 1945, quelque 50 000 sympathisants de gauche, francs-maçons et tout autre opposant au régime franquiste.
Avant de commencer son enquête, Garzon entend rassembler le maximum d'informations sur ces milliers de disparus. La tâche est des plus ardues : une bonne partie des archives a été détruite par les franquistes et la grande majorité des exécutions n'a été précédée d'aucun procès. Le juge de l'Audience nationale, principale instance pénale espagnole, va dans un premier temps s'adresser aux institutions les plus significatives. Ainsi, il a demandé au mausolée du dictateur Franco du Valle de los Caidos, géré par le Patrimoine national et les moines bénédictins, la liste des 33 000 personnes enterrées sous ce vaste monument construit par 20 000 travailleurs forcés républicains.
Ouverture des registres paroissiaux
Garzon souhaite également obtenir des informations sur les personnes jetées dans les fosses communes au début de la guerre civile. Il a envoyé une requête aux maires de Madrid, Cordoue, Séville et Grenade pour qu'ils recherchent dans leurs archives «les circonstances de la mort de ces quelques milliers de personnes».
L'autre interlocuteur privilégié de Garzon pour ses recherches n'est autre que l'Église, qui fut une fervente alliée de Franco durant les quarante ans de dictature. Le magistrat a demandé à la Conférence épiscopale espagnole l'ouverture par les quelque 22 000 paroisses du pays de leurs registres à la police judiciaire. Grâce à ces registres paroissiaux, le juge espère recueillir des données sur les républicains disparus au lendemain du coup d'État, le 18 juillet 1936. Enfin, le magistrat entend se pencher sur les victimes du Tribunal spécial pour la répression de la franc-maçonnerie et du communisme, mis en place en 1939.
L'initiative du juge Garzon ne va sans doute pas passer inaperçue. Même si le sujet n'est plus tabou, notamment depuis l'arrivée au pouvoir en mars 2004 du socialiste José Luis Zapatero, la réhabilitation des victimes du franquisme suscite encore de vifs débats historico-politiques au sein de la société espagnole. L'entrée en vigueur de la loi sur la mémoire historique en juillet 2007 a été décriée par les conservateurs, tout comme l'éradication des symboles franquistes. Le Parti populaire accuse la gauche de «rouvrir les blessures du passé». Et déjà, certains barons de la droite regrettent que «Garzon réveille les fantômes du passé».
1 comentario:
RENOUVELLEMENT DU TRIBUNAL CONSTITUTIONNEL ET FRANQUISME
Dans l'opinion de Francisco José Hernando Santiago, "le général Franco avait été un homme très sensible à la justice" ("Par leurs faits vous les reconnaîtrez", député Iñaki Anasagasti au journal Deia, 21.08.2005).
Dès le cadre de récupération de la Mémoire Historique et l'effort pour mettre fin au "modèle espagnol d'impunité", un pas absolument nécessaire pour recouvrir la crédibilité internationale de l'Espagne, on ne peut que s'inquiéter quand le Parti Populaire (PP) soutien la candidature de Me Hernando au Tribunal Constitutionnel nonobstant le profil qui en découle de ses paroles.
http://poderjudicial.wordpress.com
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